André Gide et l'aphorisme. Du style des idées,
collection « Investigations stylistiques »,
Résumé : Comment comprendre l’omniprésence du style aphoristique chez un auteur soucieux de tenir à distance toute posture de moraliste et, plus encore, toute intention moralisante ? L’étude de l’oeuvre d’André Gide (fictionnelle, critique et personnelle), considérée dans sa spécificité, mais représentative, aussi, d’un style d’époque, permet de dépasser, de trois manières complémentaires, cet apparent paradoxe. Parangon d’un idéal stylistique défini par la concision, la fermeté et la précision, l’aphorisme contribue aussi, comme mise en scène d’une idée générale, à renouveler les genres ; enfin, il reflète et questionne la problématique question du rapport de l’écrivain à la construction d’une position et d’une autorité en littérature.
Pour plus d'informations, voir le site de l'éditeur.
Le livre Gide face à Dostoievski. Par-delà le mariage du Bien et du Mal publié par Carmen Saggiomo effectue une exploration systématique de l'étude qu’André Gide a consacrée à l’écrivain russe Dostoïevski, dans l'ouvrage homonyme publié en 1923 chez Plon à Paris. Il s’agit d’un écrit que Daniel Moutote a défini comme "le chef-d’œuvre critique" de Gide et Eric Marty comme une œuvre de "philosophie de la littérature".
Carmen Saggiomo fait émerger de cette œuvre gidienne trois plans : le théâtre des idées énoncées par les personnages dostoïevskiens ; la fluidité de la pensée de Dostoïevski qui se soumet à ces idées ; la pensée de Gide qui se soumet à celle de Dostoïevski. La recherche ne souhaite pas seulement mettre en lumière le premier et le deuxième plan, mais également éclairer le troisième, en reconstruisant, à travers les idées que Gide sème tout au long de son parcours, sa pensée explicite et implicite, et parfois même inconsciente.
Cette étude, après avoir sondé la méthode critique de Gide et la méthode de composition de Dostoïevski, dégage les nœuds thématiques qui émergent des réflexions du premier et des personnages du second : l’analyse des contradictions entre les passions, la critique épistémologique des mots (observés dans leur incapacité de cueillir la fluidité de la vie), la question anthropologique de la spontanéité, la discussion spéculative des mythes du nihilisme, la comparaison entre Nietzsche et Dostoïevski, la confrontation entre l’esprit critique français et celui de l’âme russe, la question des Nations et du sentiment européen. Il peut ainsi en découler un double effet herméneutique : faire lire Dostoïevski à travers Gide et faire lire Gide à travers Dostoïevski.
Dans ce parcours, les différentes formes du mal, les diverses déclinaisons du nihilisme, les figures distinctes des nihilistes et les multiples typologies de la gratuité sont reconstruites, alors qu’est mise en discussion, entre autres, la durabilité même de la thèse gidienne selon laquelle les idées des personnages dostoïevskiens devraient être considérées comme relatives aux circonstances dans lesquelles elles sont prononcées. D’autres noyaux fondamentaux émergent donc : la question de l’art, le statut de la littérature, la discussion sur les influences entre les auteurs, la comparaison entre l’inspiration et le travail littéraire, la problématique de l’humanisme et de l’antihumanisme. En particulier, à propos de l’interrogation sur le mal, on considère la thèse gidienne selon laquelle il n’y a pas de saints parmi les artistes et il n’y a pas d’artistes parmi les saints, vu que pour Gide la présence du mal est considérée comme inévitable, non seulement dans la création artistique, mais également dans toute expérience humaine. On met également en évidence l'approche analogique avec laquelle, selon la perspective gidienne, Dostoïevski résout le problème du rapport entre l’individualisme et la renonciation à l’individualité, entre le nationalisme et le sentiment cosmopolite, entre l’Evangile interprété selon une sensibilité anarchique et l’Evangile interprété selon une sensibilité bouddhiste.
Ce livre, comme le souligne également Pierre Masson dans sa préface, a un atout singulier : il parvient à identifier un fil d’Ariane afin de permettre au lecteur de se désenchevêtrer du labyrinthe des questions littéraires, psychologiques, éthiques et philosophiques complexes, que Gide, consciemment ou inconsciemment, a semé à travers son œuvre.
Enrico Guerini, docteur en littérature française de l'Université de Bologne, vient de publier aux éditions de L'Harmattan L'Aveu homosexuel dans les oeuvres autobiographiques d'André Gide et de Julien Green.
Parution 4 mai 2018 • 244 pages
Présentation de l'éditeur :
Les autobiographies d'André Gide et de Julien Green peuvent être considérées comme de véritables modèles de confession homosexuelle ; mais s'il est vrai que les deux écrivains se mettent à nu dans ces textes, il faut bien reconnaître qu'ils le font de manière très biaisée, à travers de multiples détours. Cet ouvrage propose une analyse de ces stratégies.
Avant-propos de Peter Schnyder
Coédition Gallimard / Fondation Catherine Gide
Oxford University Press est heureuse d’annoncer la publication du livre Diaries Real and Fictional in Twentieth-Century French Writing par Sam Ferguson, chercheur à l’université d’Oxford.
Ce livre, tiré de la thèse soutenue par Sam Ferguson à Oxford en 2014 (thèse dirigée par Ann Jefferson et Toby Garfitt, avec comme autres membres du jury Michael Sheringham et David H. Walker), est le premier ouvrage portant sur l’ensemble de l’histoire du journal intime dans le champ des lettres françaises tout au long du vingtième siècle. A travers l'étude des oeuvres diaristiques d'André Gide, Raymond Queneau, Roland Barthes et Annie Ernaux, l'ouvrage retrace l’histoire des expériences variées que les écrivains ont entretenues avec le genre du journal – fictif comme réel – et met en évidence l’importance du journal dans la vie littéraire.
La première moitié du livre est consacrée aux journaux de Gide, et dans la deuxième moitié (traitant des années 1940 jusqu’à aujourd’hui) il est souvent question de l’influence de Gide sur les nouvelles générations d’écrivains.
Table de matières :
Introduction
Part I: Andre Gide's diary-writing
1. Les Cahiers d'Andre Walter
2. Paludes
3. Le Journal des Faux-monnayeurs
4. The Journal 1889-1939
Part II: Diary-writing after Gide
5. Raymond Queneau's Œuvres completes de Sally Mara
6. The Return of the diary in Barthes’s ‘Vita Nova’
7. Annie Ernaux: The place of the diary in modern life-writing
Conclusion
Sam Ferguson, Diaries Real and Fictional in Twentieth-Century French Writing, Oxford, Oxford University Press, 2018, 272 pages.
Date de parution : 22 mars 2018.
Lien vers la page du livre sur le site d'Oxford University Press.
Lien vers le site de l'éditeur : cliquer ici.
La question de l’identité traverse l’œuvre d’André Gide. Pour ce lecteur et ce voyageur infatigables, l’écriture ne constitue pas seulement le moyen de redéfinir sa propre identité : elle est aussi le lieu d’une incessante réflexion sur l’interaction entre la singularité individuelle et l’identité collective.
Lien vers le site de l'éditeur : cliquer ici.
Cet ouvrage synthétise le thème de l’économie chez Gide. En considérant ses textes économiques du point de vue historique et moderne, cette étude examine la singularité et l’actualité de la pensée de l’auteur ainsi que l’impact de diverses questions que celle-ci implique.
Voir la présentation du volume sur le site de l'éditeur : cliquer ici.
Avec la fondation de La NRF en 1909 et du Théâtre du Vieux-Colombier en 1913, André Gide, Jacques Copeau et Jean Schlumberger, œuvrant ensemble au renouveau de la littérature et du théâtre, n'ont cessé d'appliquer l'art de la mise en scène dans leur vie comme dans leur œuvre. «Le théâtre ne m'intéresse pas assez pour que je me donne vraiment de la peine», écrit pourtant Gide qui, bien que grand connaisseur du théâtre classique et admirateur de l'œuvre puissante de Claudel, demeure réticent à l'expérience de la représentation scénique. Le théâtre reste toutefois pour lui l'un des lieux où peut s'exposer le drame intime, s'adonnant ainsi à l'écriture dramatique avec Le Roi Candaule, Saül et un inachevé Curieux malavisé d'après Cervantès, et conversant avec son ami Jacques Copeau sur les questions de mise en scène et de jeu. Le Théâtre du Vieux-Colombier lui offre également, dans la lignée de La NRF, un lieu de rencontre avec le public. Conférences, lectures et matinées théâtrales voisinent au programme de la salle avec le répertoire classique et contemporain. De là vient le célèbre essai en miroir de Gide sur Dostoïevski, issu de six causeries prononcées au Vieux-Colombier. Quant à Jacques Copeau et à sa troupe, ils bénéficieront de l'attention et de l'appui durables de Jean Schlumberger, dont l'écriture romanesque fut gagnée, de son propre aveu, par la théâtralisation.
Les contributions du présent recueil, s'appuyant sur des documents des fonds André Gide et Jean Schlumberger de la Fondation des Treilles, montrent l'implication des trois hommes dans cette entreprise de rénovation active et de réflexion. Elles sont suivies de quelques lettres inédites échangées entre Jacques Copeau et Jean Schlumberger.
Sont recensées dans cet article, régulièrement mis à jour, toutes les traductions de livres de Gide depuis 2016.
![]() |
André Gide Maised toidud [Les Nourritures terrestres]Traduction en estonien et postface de Marit Karelson illustrations inédites de Kairi Orgusaar, Allikaäärne, Mathura, 2016. |
|
![]() |
André Gide DiarioVol. 1: 1887-1925, vol. 2: 1926-1950Traduttore:S. AreccoCuratore: P. Gelli Editore: Bompiani Collana: Classici della letteratura europea Anno edizione: 2016
|
Il "diario" che André Gide cominciò a scrivere nel 1887 e tenne praticamente tutta la vita, fino alla morte nel 1951, pubblicandone larghe parti durante tutta la sua esistenza, finisce con l'essere l'opera sua più narrativa, nel desiderio di crearsi personaggio. Ma è anche indubbiamente un documento intimo, segreto, pubblico, civile, politico, per l'ansia di verità che lo anima e le battaglie condottevi (per l'omosessualità, i diritti umani violati nei paesi coloniali, in quelli comunisti). L'edizione odierna è la prima completa, perché i curatori francesi hanno recuperato anche le parti che l'autore teneva nel cassetto, ritenendole, per vari motivi, non pubblicabili. |
Sont recensées dans cet article, régulièrement mis à jour, toutes les publications sur Gide depuis octobre 2013.
N'hésitez pas à nous contacter pour annoncer une publication ou obtenir plus de renseignement sur un ouvrage spécifique.
![]() |
Prévost Jean-Pierre André Gide et la Normandiepréface de Pierre Masson, Paris, Orizons, 2017 |
On sait qu’André Gide (1869-1951) passa sa vie à voyager, sans toutefois renier ses points d’ancrage que furent Paris, le Midi, la Normandie. Ses liens avec la Normandie sont nombreux et divers. Des liens familiaux tout d’abord puisque c’est à Bolbec, à Louviers et à Rouen que ses ancêtres, côté maternel, s’étaient établis. C’est donc par filiation que Gide hérita du château de la Roque-Baignard, situé près de Lisieux. Son proche voisin, Jean Schlumberger, l’accueillit ensuite en ami au château de Braffy, au Val-Richer. Par sa cousine Madeleine Rondeaux, devenue son épouse, il migra ensuite à Cuverville dans le Pays de Caux. Mais il ne cessa d’arpenter la Normandie. De par ses liens amicaux avec Roger Martin du Gard il séjournera à plusieurs reprises au château du Tertre, près de Bellème, également à Offranville, chez Jacques-Émile Blanche, à Yport chez Jean-Paul Laurens, à Dieppe chez Walter Sickert, à Alençon auprès de son beau-frère Marcel Drouin, à Elbeuf chez André Maurois, à Berneval au chevet de son ami déchu Oscar Wilde. Sans oublier toutes les excursions à Honfleur, à Trouville, à Étretat… Ces attaches normandes ont rarement été étudiées dans leur globalité, et c’est précisément l’objet de cet ouvrage que d’en établir la géographie… et l’histoire, en s’attachant tout particulièrement à décrire la diversité des lieux et des paysages de cette belle région française, mais aussi de raconter quelques-uns des moments privilégiés qu’y vécut André Gide, entouré de ses proches et de ses amis. |
![]() |
Saggiomo Carmen La Fortuna italiana delle "Caves du Vatican" di André Gideprefazione di Pierre Masson, Ariccia, Aracne, 2015 |
|
![]() |
Lysøe Éric et Soncini Anna (éds.) "Corydon" d'André GideBologne, I libri di Emil, 2016 |
Dans chaque volume de la collection «Analyses textuelles», des critiques littéraires de formations et de spécialités différentes proposent leur lecture et interprétation d’un même texte de la littérature française ou francophone, et répondent aux questions auxquelles leurs réflexions ont donné lieu. Dans ce volume, Patrick Pollard, Pierre Masson, Éric Lysøe, Anna Soncini Fratta, Frank Lestringant, ainsi que d’autres chercheurs et des étudiants, se confrontent à Corydon d’André Gide.In ogni volume della collana «Analyses textuelles», illustri critici letterari e specialisti in differenti materie propongono la loro lettura e interpretazione di uno stesso testo della letteratura francese e francofona, rispondendo alle questioni che le loro stesse riflessioni hanno generato. In questo volume Patrick Pollard, Pierre Masson, Éric Lysøe, Anna Soncini Fratta, Frank Lestringant insieme ad alcuni ricercatori e studenti, si confrontano con Corydon d'André Gide. |
![]() |
Goulet Alain Gide, "Les Faux-monnayeurs", "Journal des Faux-monnayeurs"Paris, Atlande, "Clefs Bac Littérature", octobre 2016 |
|
![]() |
Priol Philippe Gide d'ici et d'ailleursRouen, Editions Petit à Petit, 2016 |
On connaissait Gide, parisien de naissance, on se rappelait que son père était un cévenole, de souche calviniste, on savait vaguement que sa mère était originaire de Rouen, mais on l’avait vite oublié. Pourtant outre les racines profondes du côté paternel qui s’enfoncent dans la garrigue du côté d’Uzès où vécurent bon nombre de ses ancêtres, il y a de l’autre côté l’atavisme normand et rouennais. |
![]() |
Jean-Pierre Prévost et Pierre Masson André Gide et Oscar Wilde, Deux Immoralistes à la Belle époqueParis, Orizons, 2016. |
André Gide et Oscar Wilde : deux personnalités hors-normes.Raconter, sous tous ses aspects, l’histoire de leur rencontre, s’apparente à une enquête de détective. Leurs liens complexes ont, en effet, des ramifications multiples, tant par leurs affinités, avouées ou secrètes, littéraires ou humaines, que par l’influence profonde et durable exercée par Wilde sur Gide, avec ses multiples péripéties et rebondissements.Il nous a semblé opportun de replacer cette histoire dans ce contexte qu’on appelle La Belle Époque, avec ses nombreux salons littéraires, ses cafés, ses revues, ses auteurs et ses artistes, peintres, caricaturistes, créateurs de mode. Nous voyons comment cette courte période, étrangement faste pour la liberté d’expression, a permis l’éclosion de tant de talents autour des milieux symbolistes, dandys, « décadents ». Mais aussi les limites de la permissivité d’une société vertueuse envers ses saltimbanques.Certains d’entre eux ont payé au prix fort le franchissement des tabous : ainsi Wilde, brisé par un procès et des années d’emprisonnement. D’autres, plus prudents, tel Gide, ont senti venir l’orage, et différé provisoirement l’affirmation de leurs goûts.Leurs œuvres et leur mode de vie ont constitué un véritable laboratoire d’idées neuves, et une tentative pour faire sauter interdits et conformismes. Un travail toujours actuel. |
![]() |
Masson Pierre Les Sept Vies d’André GideParis, Classiques Garnier, « Bibliothèque Gidienne », 2016 |
En partant des écrits d’André Gide, cet ouvrage suit la formation et l’évolution de cette personnalité complexe sous sept angles : la vie du corps, la vie des autres, la vie nomade, la vie de famille, la vie d’écrivain, la vie morale, la vie spirituelle. |
![]() |
Angelo Anne-Sophie Le Sens des personnages chez André GideParis, Classiques Garnier, « Bibliothèque Gidienne », 2016 |
Entre 1902 et 1925, l'existence du personnage gidien est plurielle : morale, fondée sur la notion de caractère ; symbolique, car il invite le lecteur à articuler particulier et général ; temporelle, enfin, par le biais d'une trajectoire qui peut faire l'objet d'un jugement moral. |
![]() |
Gury Christian, Gide et Lyautey, précédé de Gide et Certains Faits-DiversParis, Non lieu, 2016 |
|
![]() |
Debard Clara, Masson Pierre et Wittmann Jean-Michel (éds.) André Gide et la réécritureColloque de CerisyLyon, Presses Universitaires de Lyon, « André Gide – Textes et correspondances », 2013 |
Après vingt ans de mise au jour de textes inédits, de précieuses correspondances, de manuscrits préparatoires, et après une nouvelle édition complétée de ses œuvres dans la Bibliothèque de la Pléiade, le moment était venu de considérer l’ensemble du corpus des œuvres d’André Gide comme un tout dont les éléments s’appellent et se complètent : des réseaux se forment, des images obsessionnelles se révèlent, des arrière-pensées se dévoilent, André Gide ne cessant de réécrire les données que lui fournissent son vécu, ses lectures et son époque, comme autant de matériaux à transmuer en œuvres d’art. Ce colloque de l’été 2012 à Cerisy-la-Salle, le troisième en cinquante ans consacré à André Gide, s’est attaché particulièrement à éclairer les enjeux engagés par cette écriture au second degré, montrant comment un écrivain porté aux débats et aux échanges culturels a tissé et croisé les idées et les textes fondateurs de notre imaginaire et de notre culture. |
![]() |
Wittmann Jean-Michel (éd.) Gide et la BibleActes de la journée d’étude du 15 mai 2013 organisée à MetzBAAG, nos 179-180, juillet-octobre 2013 |
Sont recensées dans cet article, régulièrement mis à jour, toutes les publications autour de Gide et son époque depuis 2017.
N'hésitez pas à nous contacter pour annoncer une publication ou obtenir plus de renseignement sur un ouvrage spécifique.
![]() |
Jean-Claude Perrier Indian PaludesParis, Belfond, 2017 |
GIDE VIVANT !
En dépit de ses innombrables voyages, Gide le nomade n'est jamais allé en Inde. Où, pourtant, un certain nombre de raisons personnelles, historiques, poétiques auraient pu le requérir. Il n'en fallait pas plus pour que l'imagination de Jean-Claude Perrier s'emballe, et qu'il s'empare de Paludes, le plus contemplatif, le plus immobile des livres d'André Gide.
Gide, donc, est toujours vivant, et le voici qui s'embarque pour Pondichéry, afin d'achever, in situ, sa traduction du mystique Kabîr, tout en découvrant un pays qui l'enchante. Au passage, il fait quelques belles rencontres, se laisse porter par sa curiosité, pousse les portes de tous les temples... Gide, accueillant Jean-Claude Perrier comme un nouveau Nathanaël, l'invite à l'accompagner en pensée durant son séjour, à s'émanciper pour écrire son Indian Paludes et, en vertu d'une mise en abyme audacieuse, à en faire – ah ! – le plus irremplaçable des remakes. |
![]() |
Jacques Roussillat Maria Van Rysselberghe, la petite dame d'André GidePierre-Guillaume De Roux, février 2017 |
Entre 1973 et 1977 paraissent, aux éditions Gallimard dans la collection des « Cahiers André Gide », Les Cahiers de la Petite Dame, « longue et minutieuse chronique entièrement consacrée à la vie d'André Gide. L'ouvrage fut, on s'en doute, très remarqué. Mais on ne prêta guère attention à cette "Petite Dame". [...] Il faut bien admettre qu'en se rangeant dans l'orbite d'André Gide, elle avait pris le risque de connaître le sort des compositeurs contemporains de Mozart ou des collaborateurs de Louis Pasteur, c'est-à-dire la relégation. [...] Encore aujourd'hui on continue de préférer son surnom à son patronyme. » Il était grand temps de réhabiliter Maria Van Rysselberghe (1866-1959), écrivain belge injustement occulté, figure décisive de la vie littéraire parisienne dont ses célèbres Cahiers rendirent compte avec un inlassable brio. Née Monnom dans une famille d'imprimeurs-éditeurs, celle qu'on appela « La Petite Dame » n'est pas seulement une enfant de la Belgique mécène et inspirée des années 1870, où s'épanouissent alors le symbolisme et l'Art Nouveau grâce au dynamisme des revues artistiques et au talent des plus grands qui seront ses familiers : Georges Rodenbach, Émile Verhaeren, Maurice Maeterlinck ou Henry van de Velde... Celle qui épousera le peintre Théo Van Rysselberghe avant de se lier avec Aline Mayrisch, critique et mécène d'envergure surnommée Loup, est d'abord une femme hors du commun, décidée à s'affranchir des préjugés de son milieu et de son temps. Dotée d'un sens critique d'une rare acuité, portraitiste inimitable, mémorialiste au long souffle, Maria Van Rysselberghe chérit, de préférence, les maudits, les rebelles. Elle était donc préparée à prendre fait et cause avant tout le monde pour André Gide, écrivain scandaleux qui devait bouleverser les canons de la littérature. Elle deviendra son amie, sa confidente, et surtout sa lectrice de référence, intimement liée, entre autres choses, à l'aventure de La Nouvelle Revue française. |