Un Centre dédié à la recherche sur André Gide

Le Centre d’Études Gidiennes a vocation à coordonner l'activité scientifique autour de Gide, diffuser les informations relatives aux manifestations gidiennes et à rendre visibles et accessibles les études qui lui sont consacrées.
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Stephanie Bertrand Jean-Michel Wittmann
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Vous trouverez en bas de cette page plusieurs ressources critiques en ligne sur cette oeuvre. Elles figurent en couleur.

 

     On connaît la passion de Gide pour Chopin : manifeste dès sa jeunesse, elle ne s’est jamais démentie, et même n’a jamais cessé d’aller crescendo. Gide fit de Chopin l’un de ses modèles, voire l’un de ses doubles fantasmés.

     Il fallait donc que l’écrivain donnât, outre les méditations diaristiques qu’il consacre à Chopin, un recueil de réflexions sur le compositeur. Après avoir rêvé sans l’écrire à un livre sur Chopin et Schumann dès les années 1890, il confiera en 1931 à La Revue musicale la première version de ses Notes sur Chopin. Une version intermédiaire de l’opuscule, quelque peu remaniée, paraît ensuite en 1939 dans le tome XV des Œuvres complètes. Puis la version « définitive », augmentée de fragments du journal et d’extraits de partitions, est publiée par L’Arche en 1948. Enfin, en 2010, Gallimard republie les Notes sur Chopin, avec un bel avant-propos du pianiste et compositeur Michaël Levinas.

    Ces Notes, comme leur titre l’indique, ne prétendent pas s’organiser en un discours systématique. S’y dessinent néanmoins quelques lignes de force. D’une part, Gide présente Chopin comme le plus éminent représentant d’une esthétique classique typiquement française : « Si je reconnais, dans l’œuvre de Chopin, une inspiration, un jaillissement polonais, il me plaît de reconnaître également à cette étoffe première une coupe, une façon françaises » (L’Arche, p. 11). « Les Notes sur Chopin forment non seulement un traité musical précis, mais elles constituent aussi un véritable manifeste esthétique, une théorie de l’art et de la poésie », écrit Aliocha Wald Lasowski (Le Jeu des ritournelles, p. 67). Gide, de fait, se comporte à la fois en critique et en théoricien, comme l’a finement remarqué Peter Schnyder : « les Notes sur Chopin […] laissent percer la pensée critique de l’écrivain, son originalité » (Pré-textes : André Gide et la tentation de la critique, p. 7). D’autre part, les Notes sur Chopin « sont en grande partie assimilables à un cours d’interprétation » (Roger Delage, p. 26). Gide y donne des indications fort précises aux musiciens qui liraient son livre, qui eût pu être sous-titré Conseils à un(e) jeune pianiste. Les éditions Gallimard, d’ailleurs, ne s’y sont pas trompées, puisque, dans l’édition de 2010, elles ont adjoint aux Notes la transcription de la leçon donnée à la jeune Annick Morice en 1950. Enfin, Gide, malgré sa répugnance à l’égard des comparaisons intermédiales, ne cesse de rapprocher Chopin de Baudelaire. Le compositeur et le poète ont selon lui en commun d’être maltraités par leurs interprètes : « Avez-vous parfois entendu des acteurs déclamer du Baudelaire comme ils feraient du Casimir Delavigne ? Eux jouent Chopin comme si c’était du Liszt » (p.16).

     On l’aura compris : le Chopin de Gide n’est ni celui des virtuoses, ni celui des salons. Aussi, même si Gide reçut quelques soutiens (parmi lesquels celui de Nadia Boulanger), les Notes lui valurent-elles quelques inimitiés – à commencer par celles d’André Suarès, d’Igor Stravinsky et d’Arthur Rubinstein. Aussi bien Gide ne cherchait-il pas à se faire des amis parmi les musiciens : en témoigne la dédicace du livre, qui rend hommage au directeur du Monte Cassino, que Gide crédite d’une compréhension profonde de Chopin… précisément parce qu’au lieu de jouer les œuvres du compositeur, le Père Abbé se contentait de les lire en silence.

     Signalons pour terminer qu’en 2010, le compositeur Pierre Thilloy a donné un quatuor à cordes avec récitant intitulé Notes sur Chopin (op. 178). Commande de la Fondation Catherine Gide, cette œuvre a été créée le 13 mai 2010 au Grand Théâtre de Bordeaux lors du Festival International « Quatuors à Bordeaux ».

Augustin Voegele

Bibliographie raisonnée

Éditions 

« Notes sur Chopin », La Revue musicale, 1931.

Notes sur Chopin, Œuvres complètes, tome XV, Paris, Gallimard, 1939.

Notes sur Chopin, Paris, L’Arche, 1948.

Notes sur Chopin, avec un avant-propos de Michaël Levinas, Paris, Gallimard, 2010.

Dossier de presse

Pour le dossier de presse des Notes sur Chopin, on pourra consulter les numéros 163 (juillet 2009, p. 415) et 166 (avril 2010, p. 251) du Bulletin des Amis d'André Gide.

Études critiques (relatives aux Notes sur Chopin ou à la place de Chopin dans l’œuvre de Gide)

Acquisto Joseph, « La musique du désir et de la pureté. Gide face à Chopin et Baudelaire », Bulletin des Amis d’André Gide, n° 157, janvier 2008, p. 19-32.

Bompaire François, « De la musique à l’ironie, et retour. Interprétation musicale et interprétation textuelle dans l’œuvre d’André Gide », in Greta Komur-Thilloy et Pierre Thilloy (éds.), André Gide ou l’art de la fugue, Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 175‑194.

Brunel Pierre, Aimer Chopin, Paris, Presses Universitaires de France, 1999.

Brunel Pierre, « Gide et Chopin », Basso continuo. Musique et littérature mêlées, Paris, Presses Universitaires de France, 2001, p. 87‑99.

Delage Roger, « André Gide et la musique », Bulletin des Amis d’André Gide, n° 39, juillet 1978, p. 13‑28.

Franceschetti Giancarlo, « André Gide Esegeta di Chopin », Aevum, volume 37, n°1‑2, janvier-avril 1963, p. 170-186.

Hoeges Dirk, « Pro Chopin, Contra Wagner : André Gide und die Musik », in Hans T. Siepe et Raimund Theis (éds.), André Gide und Deutschland, Düsseldorf, Droste Verlag, 1992, p. 58-65.

Holcman Jan, The Legacy of Chopin, New York, Open Road Media, 2015.

Jean-Aubry Georges, André Gide et la musique, Paris, Éditions de la Revue musicale, 1945.

Lefébure Yvonne, « André Gide interprète de Chopin », Contrepoint, n° 6, 1949, p. 34-42.

Masson Pierre, « Les Notes sur Chopin, ou le livre impossible d’André Gide », Bulletin des Amis d’André Gide, n° 166, avril 2010, p. 113‑132.

Masson Pierre, « Gide et la musique. De l’impur au pur », in Greta Komur-Thilloy et Pierre Thilloy (éds.), André Gide ou l’art de la fugue, Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 37‑52.

Métayer Bernard, « Gide et Chopin », Bulletin des Amis d’André Gide, n° 85, janvier 1990, p. 65-92.

Meylan Pierre, « André Gide, pianiste », Les Écrivains et la musique, volume 2, Lausanne, Éditions du Cervin, 1952, p. 62-78.

Moutote Daniel, « La Musique », André Gide : esthétique de la création littéraire, Paris, Champion, 1993, p. 35‑41.

Rubinstein Arthur et Bauër Gérard, « Chopin, André Gide et Arthur Rubinstein », Le Figaro littéraire, 11 octobre 1952. 

Schnyder Peter, Notices « Chopin » et « Notes sur Chopin », in Pierre Masson et Jean-Michel Wittmann (éds.), Dictionnaire Gide, Paris, Classiques Garnier, 2011, p. 86-87 et p. 280-281.

Schnyder Peter, « André Gide et l’harmonie. Comment une catégorie musicale devient une catégorie existentielle », in Greta Komur-Thilloy et Pierre Thilloy (éds.), André Gide ou l’art de la fugue, Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 53-69.

Sistig Joachim, André Gide : die Rolle der Musik in Leben und Werk, Essen, Die Blaue Eule, 1994, en particulier p. 193‑206 et p. 401‑430.

Sistig Joachim, « La topographie esthétique de l’univers musical gidien », in Greta Komur-Thilloy et Pierre Thilloy (éds.), André Gide ou l’art de la fugue, Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 21-37.

Toudoire-Surlapierre Frédérique, « “Il y a un Gide intime qu’on ne connaît pas. Coupez.” », in Jean-Michel Wittmann (éd.), Gide ou l’identité en question, Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 77-100.

Voegele Augustin, « André Gide et Thomas Mann : se comparer à Chopin pour mieux se recréer », in Nikol Dziub (éd.), Comparaisons, n° 1 : « La Comparaison créatrice : interculturalité et intermédialité », 2017.

Vukuzic Zorica Maja, « “Bez glazbe, život bi bio pogreška” – Chopin kod Gidea, Sartrea, Nietzschea i Barthesa », in Književna smotra, Časopis za svjetsku književnost, numéro 157‑158, 2010, p. 51‑60.

Vukuzic Zorica Maja, « Le piano touchant/touché : l’instrument du contretemps chez Gide, le cas du Journal et des Notes sur Chopin », Studia romanica et anglica zagrebiensia, n° 55, 2010, p. 79-102.

Vukuzic Zorica Maja, « Gide et Chopin – le parfait écrivain devrait être musicien », Bulletin des Amis d’André Gide, n° 176, octobre 2012, p. 309-352.

Vukuzic Zorica Maja, « Des Notes sur Chopin à l’opéra. L’angle mort du Journal de Gide », in Greta Komur-Thilloy et Pierre Thilloy (éds.), André Gide ou l’art de la fugue, Paris, Classiques Garnier, 2017, p. 151-171.

Vukusic Zorica Maja, « La musique est une “bonne métaphore” : le Chopin de Gide, anti-Wagner et anti-wagnérien », in Nathalie Vincent-Arnaud et Frédéric Sounac (éds.), Figure(s) du musicien. Corps, gestes, instruments en texte, 2017.

Wald Lasowski Aliocha, Le Jeu des ritournelles, Paris, Gallimard, 2017.

Wald Lasowski Roman, « Écriture et piano. Gide, Barthes, Chopin », in Raphaël Célis (éd.), Littérature et musique, Bruxelles, Facultés universitaires Saint-Louis, 2001, p. 161-171.

Zurowka Joanna, « Gide et Chopin », Chopin et les Lettres, Varsovie, Centre de civilisation française, 1991, p. 119-125.

Le site du CEG a été réalisé grâce au soutien de la Fondation Catherine Gide, avec la participation de l’Association des Amis d’André Gide. Il a été réalisé en partenariat avec Martine Sagaert, responsable du site originel andre-gide.fr, créé en 2006 avec des étudiant.e.s de l'I.U.T. des Métiers du Livre de Bordeaux.