Un Centre dédié à la recherche sur André Gide

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André Gide, Parcours critiques – avec un texte inédit, édition de Peter Schnyder, Classique Garnier, 2023,  912 p., 49€

 

Présentation de l'ouvrage par Pierre Masson :

     À un moment où l’entrée de l’œuvre d’André Gide dans le domaine public entraîne la multiplication de ses rééditions, il ne faut pas se méprendre, et prendre ce gros volume pour la simple reprise des Essais critiques, parus en 1999 dans la Bibliothèque de la Pléiade. Ceux-ci se voulaient à la fois sélectifs et exhaustifs, dans la mesure où ils se limitaient à la critique littéraire de Gide, mais pour en rassembler toutes les occurrences, de l’entrefilet anecdotique à la monographie conséquente. La visée de Peter Schnyder, en composant ce nouveau recueil, est différente : à la littérature, il ajoute la peinture et la musique. On sait bien que Gide fut un adorateur de Chopin, on sait moins que son intérêt pour la peinture, stimulé par la présence de nombreux peintres dans son entourage, fut constant et réfléchi.

    Parcours critiques se compose donc d’un parti-pris, en trois parties. La première, « Lettres, arts, culture, propose une série d’entrées de diverse nature (« écriture », « Europe », « traduction », « censure littéraire », etc.) présentées par ordre alphabétique. La deuxième, « écrivains et artistes », recense dans le même ordre, d’Artaud à Wilde, les études et hommages que Gide a consacrées aux morts plus qu’aux vivants, préférant sans doute méditer sur l’œuvre achevée. La troisième, la plus courte, présente la longue série de notes prises par Gide en 1890, au cours de sa lecture de L’Évolution en littérature de Brunetière ; et à la suite, une postface de Peter Schnyder analysant la portée de ces pages inédites.

    Cette partie sert de clef pour comprendre l’ensemble de l’œuvre critique de Gide, et elle aurait aussi bien pu être placée en tête du volume. En effet, on le voit affirmer, au seuil de sa carrière, sa quête d’une perfection qui soit en même temps une progression, la création étant une quête individuelle qui tend à l’universalisme. À ce titre, l’évolution des genres selon Brunetière l’intéressait, en dépit de son scepticisme à l’égard de l’Histoire, car elle permettait d’envisager, d’un artiste à l’autre, la reprise d’une quête vers la perfection que chacun s’efforçait d’atteindre selon sa propre idiosyncrasie.

    Muni de cette clef, le lecteur peut alors parcourir à son gré ce volume, un peu comme on le fait pour les « dictionnaires amoureux », considérant chaque entrée comme se suffisant à elle-même, déchargée de l’ancrage historique par rapport auquel elle apparaîtrait davantage comme un simple document. Pratiquant une sorte de « dégustation à l’aveugle », on goûte autant les qualités stylistiques qu’heuristiques de ces textes. Mais devant la diversité des sujets abordés par Gide, on est aussi invité à rechercher des rapprochements, ébaucher des parcours de lecture. Il y a ainsi une série de textes sur la nature de l’œuvre d’art et les conditions de son éclosion, d’autres sur son inscription dans l’époque et la responsabilité qui en découle pour l’artiste ; les diverses réflexions sur le nationalisme et sur les rapports avec l’Allemagne montrent par où l’artiste Gide put devenir engagé. C’est ce qu’on retrouve dans les éloges de Malraux et de Saint-Exupéry, tandis qu’avec Chopin, Proust et Mallarmé s’exhale l’aspiration à l’indicible.

    Peter Schnyder propose ici, non une somme, mais un chantier en cours, fidèle en cela à la façon dont Gide considérait son activité d’écrivain. Laissant dans les coulisses toutes les gloses érudites qui pourraient détourner le lecteur de l’essentiel, il confie aux notes et surtout à deux riches index le soin de renseigner sa curiosité. Fidèle à son projet de révéler la critique de Gide comme une œuvre vivante, il en dispose les éléments comme un puzzle dont il a l’élégance de laisser à chacun le soin de trouver le modèle.

 

Pierre Masson.

Le site du CEG a été réalisé grâce au soutien de la Fondation Catherine Gide, avec la participation de l’Association des Amis d’André Gide. Il a été réalisé en partenariat avec Martine Sagaert, responsable du site originel andre-gide.fr, créé en 2006 avec des étudiant.e.s de l'I.U.T. des Métiers du Livre de Bordeaux.